2.3.09

Mes pupilles dévoraient les couleurs...

Voilà que j'étais dans le café, à songer à ma mort, à sourire en me voyant plonger au creux d'une certaine noirceur, paisible et réconfortante. Et, dans le brouhaha du café, des assiettes qui s'entrechoquaient et les ustensiles qui valsaient entre les bouches baveuses, je sentais que mon rythme cardiaque reprenait sa course normale, que je pouvais respirer avec une certaine quiétude... qu'il n'y avait en fait aucune crainte à avoir, aucun risque qui frémissait sous mon nez. Que la délicatesse d'un après-midi à flâner, et errer longuement dans la temporalité des mots.

Et puis, du silence qui se faisait dans ma tête, de la lourdeur qui s'effritait contre la légèreté de mon écriture, une voix vint frapper contre mon tympan et j'eus le souffle coupé, l'espace d'un moment; ma mort, ce n'était plus cette chute doucereuse, plutôt quelque chose d'inquiétant, de troublant; le doute, encore. Peut-être n'aurais-je pas dû revenir ici? Croiser des spectres que je voulais inconnus... 

Peut-être, mais c'était trop tard, forcément. 

J'avais reconnu la voix de Mathilde. La grande, svelte, magnificiente Mathilde; ses longs cils qui perlaient dans la lumière, sa bouche sulfureuse, ses bras qui s'élançaient dans de gracieux mouvements sensuels. Elle parle et sa voix était un miel; elle riait, et son rire me faisait l'effet d'un baume et d'un poison à la fois. 

J'eus d'abord envie de pencher ma tête sur le papier, et de me laisser faussement et entièrement absorbée par l'écriture, par le papier que j'encrais à petites larmes. Bien sûr, elle pouvait passer à côté de moi, et sentir mon parfum, et ne reconnaître en moi rien d'autre qu'une petite Montréalaise pseudo-hippie, pseudo-bon genre. Mais l'idée de l'ignorer me fit froid dans le dos...

Il y avait des étoiles dans mes yeux, à ce moment; le silence le plus complet dans ma tête et mes veines qui vibraient. La lumière se diffusait dans mes pupilles et le temps lui-même rigolait à gorge déployée. Je laissais mes yeux avaler le chaos de l'après-midi et un étrange sourire se glissa sur mes lèvres; un sourire qui s'adressa à Mathilde alors qu'elle passait tout près de ma table.

Elle me vit alors, et demeura estomaquée durant quelques secondes, puis prit un air ébloui et s'empara de mon visage qu'elle embrassa longuement. 

C'était Mathilde, la copine de l'homme dont j'étais follement amoureuse. 

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