27.5.09

Vouloir mourir...

Il me fallait cesser de respirer. Entendre sa voix, voir son beau visage, ses yeux si doux se poser sur moi, sa gentillesse qui empestait dans tout le café... J'avais envie de vomir, de lui cracher mes entrailles.

Plutôt, je lui souriais. Dans la fièvre de nos regards, une autre conversation... mais de celle-là on ne dirait rien, ni ne rendrait compte.

J'étais partie pour oublier son nom et le mien, pour oublier ma folie; et voilà qu'elle me revenait en plus visage; je comprenais qu'il ne servait à rien de la fuir; il fallait la regarder autrement. Mais autrement, qu'est-ce que cela voulait dire? Ma folie, ma démence... Oui, c'est que j'étais devenue délire sans verbe; je m'étais laissée porter par une vague, et je la regardais m'entraîner, alors que je courrais avec elle, derrière elle, entre elle. Dans la fièvre de l'instant, je pouvais tout voir, distinguer les courbes de ma folie pure, de ce qui ne tournait pas rond chez moi. Et pourtant, j'en dressais la plus jolie des logiques, la plus belle des traces; je me croyais tellement supérieure, et versatilement verbose!... j'avais l'impression d'avoir déceler tous les secrets de la magnificience 'conversation'! Comment savoir, que rien ne change et que tout change? Ah oui, j'aimerais à croire que dans mes gestes que je répète, dans mes habitudes que je moule sans réfléchir, la course que je suis et que j'entame perpétuellement, en réprimant celle d'avant, en poursuivant la fois d'une effroyablement rationnelle démence, les choses seront autrement!...

Mais voilà que Mathilde me regardait avec un sourire, qu'elle embrassait mes joues et partageait sa chaleur! Sur les lèvres, il y avait eu les siennes, quelques heures plus tôt, tout au plus. Je pouvais encore humer l'odeur de son haleine matinale et les cigarettes qu'il avait fumées. J'attendais son rire dans sa gorge lorsqu'elle me serrait les épaules.

- Claudia! Claudia! Mais où étais-tu donc passée? Qu'est-ce que tu nous as manqué?

Et pourquoi dire ces choses-là? Voilà qu'elle semblait si sincère, et son visage si beau, si lumineux! Je la contemplais, et mes yeux se remplissaient de larmes ridicules. J'étais ridicule, encore une fois. Effroyablement ridicule. Le ridicule allait-il cesser de me pourchasser? de courrir derrière, de se fendre la gueule en me regardant tomber, culbuter, me fracasser la tête contre des verres vides, des comptoirs humides, des épaules distantes?

Mathile, et ses yeux pleins de sincérité.

Après cinq minutes, elle était déjà partie; son parfum faisait des spirales au-dessus de mes narines et j'attendais patiemment que les larmes sèchent entre mes paupières. J'étais immobile et silence, parce que le moindre geste m'aurait fait fondre en pleurs, comme une idiote à nouveau. Voilà que j'étais dans un café où tout le monde me voyait, me reconnaissait, comprenait mes traits et mes silences et mes rires et mes regards. Je n'étais plus une étrangère, ni une exilée...

Et j'aurais tout donné pour retourner dans le cocon chaud et douillé de mon anonymat.

1 commentaire:

  1. "- Claudia! Claudia!"
    Mais que vos écrits plumement-comme-plume me plaisent...
    Un beau début d'année...
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